L'enfance de Lenwë ne fut pas des plus paisibles. Né dans une famille humaine, d'une mère et d'un père nomade, il n'a jamais cessé de voyager entre les quatre royaumes. Vendant des épices aux divers rois et aux diverses reines, il a pendant longtemps coutoyé la royauté sans jamais l'approcher, sans jamais la détester, sans jamais la comprendre, sans jamais chercher à la rejoindre. Il avait son monde et eux avaient le leur.

Né trop tôt dans une grange en urgence, on ne peut pas dire qu'il fut un bébé en bonne santé. Malade et faible, il a failli y passer de nombreuses fois, à cause de la fièvre dont il s'éprenait beaucoup trop souvent et des rhumes à répétition dont il semblait souffrir à longueur de temps. Ses parents tentaient pour le mieux de le nourrir, de le réchauffer et de le protéger et cela pendant des années, alors qu'il souffrait à répétition et que personne ne trouvait de solution pour le guérir. Néanmoins, il grandit dans un foyer aimant et attentionné, où jamais il ne manqua de quelque chose, si ce n'est de nourriture.

C'est à ses cinq ans que sa santé se stabilisa, à la suite de la naissance de son petit frère, Anar. Étrangement, Lenwë a toujours associé son rétablissement à la naissance de celui-ci et n'a jamais cessé de le protéger comme par gratitude, comme si Anar lui avait sauvé la vie. Les deux furent très proches, voyageant ensemble avec leur père et leur mère. Ils jouaient, ils discutaient, ils allaient partout ensemble et vivant dans une petite roulotte, ils dormaient même à côté. Il y eut des disputes, bien entendu, mais jamais, elles ne furent longues et jamais inévitable. Les deux êtres semblaient liés par quelque chose de plus grand que le sang, leurs âmes semblaient en parfaite symbiose. Ils apprirent à lire, à se battre, à se défendre, côte à côte, et ceux-là sans jamais s'imaginer l'un sans l'autre.

Mais c'est à l'âge de seize ans que ses parents moururent, assassinés par des nobles qui ne s'en cachaient pas. Ils voulaient des épices et ils avaient été déçu des produits qu'on leur avait vendu. Empoisonnés, les Aleïev furent rapidement oubliés par tous les royaumes qui commencèrent à s'alimenter en épice autre part. C'est en voyant que personne n'en avait rien à faire de leur destin, que Lenwë se mit à haïr cette façon de fonctionner, cette hiérarchie qu'on lui imposait. Il était en bas de l'échelle et il n'aimait pas ça. Les coupables du meurtre n'étaient pourtant pas discret et au fond, tout le monde savait qui avait tué les parents de Lenwë, mais aucune procédure ne fut jamais mener contre eux et les coupables du meurtre des Aleïev ne furent jamais emprisonnés.

Alors Lenwë continua de vivre avec Anar, dans la petite roulotte de leur parent. Il n'avait que seize ans et son petit frère onze ans. Pourtant, ils réussirent à survivre, volant à droite, à gauche, travaillant pour quelques fermiers, nourrissant une haine immense contre la royauté et sa façon de diriger.

Lenwë commença à fréquenter les bars à l'age de dix-huit ans, le soir alors qu'il rentrait d'une journée de travail écrasante, au champs d'un vieux fermier pour qui il travaillait. Au début, ce n'était que pour voler les bourses des adhérents de ce genre de lieu. Il était malin et agile. Jamais personne ne l'avait attrapé la main dans le cas. Puis, petit à petit, il commença à boire là-bas, avec d'autres personnes. Il s'y était fait des amis, parlait avec discrétion aux quelques personnes, qui voulaient bien l'écouter, de ce qu'il pensait de la royauté et des royaumes, des rois et des reines, du pouvoir mis en place. Et petit à petit, son audience s'agrandit. Les gens venaient de partout pour écouter l'homme aux idées nouvelles. Et il se rendit compte qu'on l'écoutait, qu'il n'était pas le seul en colère.

Alors il créa la rébellion, enrôla des centaines de paysans, dans tous les royaumes, nourrissant ses partisans de sa haine contre les puissants. Les rois et les reines ne méritaient pas leur place d'après lui. Ils étaient méchants et agissaient avec cruauté. Ils n'avaient aucune légitimité, il fallait les remplacer, il fallait vivre différemment. La rébellion prit de l'ampleur au fil des années. Il avait des conseillers, un bras droit et même des messagers. Un lieu où héberger ses partisans, des émissaires et des chuchoteurs qui chuchotaient aux gens ses idées. Il y avait bien eu des gens qui avaient tenté de prendre sa place, mais Lenwë était malin, intelligent et surtout, il savait se faire respecter, il savait se faire apprécier. Ce n'était pas un tyran, ce n'était pas une brute. Il prenait le pouvoir d'une façon à ce que personne ne l'en empêche, que personne ne le trouve illégitime. La plupart l'adorait et l’idolâtrait même. 

Il enrôla même son frère qui accepta de devenir garde au château de Ziemiara. Néanmoins, Anar tomba amoureux d'une des princesses de Ziemiara ; Ronnie Ziemiara. Il lui en parlait quand ils se voyaient, révélant à Lenwë qu'il ne pouvait plus continuer. Anar allait même quitter la garde royale, mais n'en eut pas le temps, se faisant découvrir au sein du château. Anar fut assassiné le jour même où le roi de Ziemiara découvrit qu'il était un espion.

Détruit, c'est à ce moment-là qu'il se mit vraiment à haïr, du plus profond de son âme, la famille Ziemiara, souhaitant leur mort. Alors même qu'il ne les avait jamais haït, ni détesté, il développa une réelle rancoeur personnelle, contre eux, se promettant qu'ils finiront au bout d'une pique. C'est d'ailleurs dans cette optique qu'il se mit à loger à Ziemiara, chez Annelyse Seekof, une des rebelles, et se rends très souvent à la cours, où il tente d'approcher la famille royale.